Primo Levi : À la recherche des racines, anthologie personnelle
Mille et une nuits, 239 pages, 120 francs

L'intérêt d'une anthologie personnelle de textes réside évidemment dans sa partialité, qui permet de découvrir souterrainement la personnalité de celui qui l'a élaborée. Chimiste de métier, Lévi écrit à son retour du camp d'Auschwitz Si c'est un homme, témoignage et réflexion absolument fondamentaux sur la condition d'homme dans l'univers concentrationnaire. Il continue de mener de front activité scientifique et écriture, jusqu'à son suicide en 1987.
Ce recueil de morceaux choisis est varié, puisqu'on y trouve de la littérature classique, voire biblique, côtoyant de la prose scientifique (Darwin par exemple). Chaque fragment est introduit par un paragraphe de présentation et de commentaire rédigé de la main de l'auteur. Le point commun à tous ces écrits, qui fonde la cohérence de l'ensemble, est la représentation de l'homme face à la difficulté, la souffrance. Ainsi se dessine un condensé possible de l'expérience humaine qui questionne notre destinée et notre précarité. Il n'est d'ailleurs pas insignifiant que l'anthologie s'ouvre sur le Livre de Job dans lequel celui-ci s'élève contre Dieu pour crier l'injustice qui l'accable (on se souvient que de nombreux Juifs perdirent la foi dans les Camps), et se referme sur un texte scientifique traitant des "trous noirs" ; l'avant- dernier extrait quant à lui, est une page sur l'expérience concentrationnaire…
Double richesse donc de cette anthologie : révéler des œuvres, tout en établissant un rapport de sympathie avec celui qui les a élues. Elle rappelle aussi, si besoin était, que Primo Lévi fut un humaniste. Enfin elle met à jour l'empreinte douloureuse et ineffaçable que fut pour chaque victime de l'holocauste le passage dans les Camps de la mort.
A noter, la préface de Lévi lui-même, très riche; et une belle post-face de l'écrivain Italo Calvino…