François Ayroles : Notes Mésopotamiennes
L’Association, 32 pages, 35 francs
Certains auteurs de bande dessinée affirment bruyamment une singularité plus ou moins factice à force d'effets graphiques, de techniques voyantes et de scénarios merchandisés.
Eminent membre de l'Ouvroir de Bande Dessinée Potentielle*, François Ayroles n'est pas de ceux-là. Notes Mésopotamiennes ressemble à une enquête tranquille et absurde menée par un détective un peu dilettante, en recul face au monde et à ses contemporains. Chaque page, au découpage simple et régulier, constitue l'un de ses comptes rendus, indices dérisoires et humoristiques d'une quête sans solution. Le dessin méticuleux et mordant fait écho à des textes d'observation acérés (et vice-versa). Du bistrot au jardin public en passant par les toilettes graffitées du musée d'art moderne, en train, en bus, en avion, on découvre peu à peu les coulisses et les personnages d'un univers ubuesque : une tentative de record du monde du plus long repas, de mystérieuses inscriptions manuscrites à suivre dans les livres d'une bibliothèque, un homme qui fait visiter sa propre maison en contant son histoire, un clochard qui collectionne les clefs… La Mésopotamie de François Ayroles semble bien être le berceau d'une civilisation aussi ridicule qu'attachante, aussi onirique que terre à terre : Babylone futile et complexe au coin du boulevard.
* Oubapo pour les intimes, descendant direct de l'Ouvroir de Littérature Potentielle (Oulipo) dont les fondateurs (Georges Pérec notamment) s'astreignaient à de fortes contraintes formelles d'écriture dont découlait une incroyable et imaginative créativité.
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