Bernard Friot : Folle
Thierry Magnier, 100 pages, 7 euros
"Quand je voulais raconter ce qui s'était passé à l'école, mamie m'interrompait : "Tu fatigues ta maman. Elle est malade." Et maman se taisait, toujours. C'est ça que je ne comprenais pas.
Et puis est arrivé le jour où j'ai bien vu qu'elle était folle."
Frank ne comprend pas. Il faut dire que ce n'est pas évident à comprendre… Comment est-ce qu'on fait face à un événement aussi injuste (mais pourquoi elle ? est-ce que c'est de ma faute ?) - bouleversant (ma mère est folle) - déstabilisant (alors ça peut arriver à n'importe qui ?) à douze ans ?… Ici, pas d'explications : un récit.
Pour Frank, la folie de sa mère est d'abord totalement inconcevable, et encore moins avouable. Et comme le plus sûr moyen de refuser une chose, c'est de se comporter comme si elle n'existait pas, Frank refuse tout en bloc.
Mais cette méthode atteint rapidement ses limites le jour où sa grand-mère arrive à la maison pour s'occuper de son père et lui. Trop de changements d'un coup, pour continuer à faire "comme avant". Les efforts de son père sont touchants, mais inutiles : quand celle qui faisait le lien entre le père et le fils est absente, toutes les relations sont à réapprendre, à reconstruire.
Petit à petit pourtant, grâce à un copain de classe et à sa famille, en particulier sa petite sœur, Frank sort de ses murs, il parvient à renouer avec les autres, à aller voir sa mère : folle ou non, c'est sa mère, il a besoin d'elle.
On n'est pas chez Cassavetes, les manifestations de la folie ne se montrent pas sur le personnage qui en est atteint, mais sur la manière dont elles éclaboussent les autres. Tout ça dans un roman de 100 pages. La simplicité a du bon.
Claire Aubert.
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