Joe Matt : Peep show Parler de soi, c'est, si l'on veut, se mettre en danger. L'auteur de Peep-show ne lésine pas de ce côté-là : rien ne nous est épargné - ni ses rêveries infantiles, ni ses conversations futiles, vautré sur son lit, avec ses copains, sur les mérites comparés de tel ou tel échantillonnage de leur collection, ni ses masturbations le long d'après-midi improductives. Nous n'ignorons rien non plus de ses accommodements égoïstes avec la jeune femme qui, avant de le quitter définitivement, aura eu le courage et l'abnégation - alors même qu'il fantasme comme un grand dadais d'adolescent sur une de ses copines à elle - de l'aimer. En quête d'un idéal féminin très calibré, mais réduit à un silence intimidé et rougissant dès qu'il croise celle qu'il décrète aussitôt comme la femme de sa vie, cet anti-héros se débat entre libido envahissante et sentimentalisme puéril. Ces "conquêtes" improbables s'avèrent d'ailleurs généralement indisponibles - quand ce n'est pas la collègue de sa copine, c'est la petite amie d'un de ses fans devenu un bon copain… Tout cela n'est pas très bon pour le moral et Joe Matt va de déconvenue ridicule en piteux échec, épaulé et morigéné à la fois par Chet (Chester Brown), son meilleur pote dessinateur, exégète complice de la vie de son copain. Depuis le départ de sa petite amie, qui le laisse encore incrédule, les journées de l'auteur sont longues et déprimantes dans le petit appartement, que viennent seulement égayer quelques coups de fil propices à de complaisantes confidences, une vidéo X par-ci par-là, et la visite impromptue des propriétaires du dessus, âgés, ceux-là mêmes qui prêtent à Matt leur magnétoscope… |