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L'Oeil électrique #28 | Portraits / Diego Gachassin

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Par Anne-Sophie Boivin.
Photos : Anne-Sophie Boivin.

La crise, moteur de créativité, coïncide avec une période charnière pour le cinéma argentin. Qualifié de néoréaliste, de cinéma qui ne drague pas, d'errance… il est presque militant pour Diego Gachassin. Vladimir à Buenos Aires, son premier film, financé par ses fonds propres (un an de travail en tant qu'assistant à la réalisation), est une investigation menée auprès d'immigrés russes en Argentine. Authentique et réaliste, son scénario révèle l'arme d'un renouveau. Diego Gachassin, 32 ans, obéit à la règle de la simplicité. Présence du quotidien, empathie pour ses personnages, il vit chaque instant aux côtés des acteurs, qui pourraient jouer leur propre rôle. Proche d'un documentaire, bien que Diego se refuse à l'admettre, son film est un miroir pour les immigrés russes auxquels il l'a présenté. Une esthétique proche de celle du photographe Sebastiaá Salgado (1) lui permet de présenter la détresse ainsi que la ténacité de Vladimir, personnage perdu entre l'espoir que sa famille a placé en lui et le soutien qu'il ne trouve pas auprès des politiques argentins.
Vladimir à Buenos Aires n'est pas encore sorti en Argentine. Seul un partenariat européen pourrait lui permettre d'être davantage diffusé. Mais Gachassin ne se décourage pas bien que les difficultés s'accumulent : taxes sur les entrées en salles, nouveaux impôts sur les cassettes vidéo et sur la diffusion à la télévision (1994). Avec la crise, les fonds de soutien sont divisés par trois et la désorganisation règne. Suite à la vague de création d'écoles de cinéma en Argentine, des Diego Gachassin sortent de l'ombre chaque année, avec l'audace de créer, sans savoir si les films verront le jour. Peu soutenus, ces jeunes cinéastes meurent d'envie de s'exprimer et s'en donnent les moyens en ayant recours à des circuits indépendants. S'ils ne se revendiquent pas "politisés", leur prise de position ne l'est pas moins. 20 à 30 films par an parviennent à s'imposer sur le territoire national mais peu s'exportent. Le peso est dévalué, les Argentins désargentés, mais les réalisateurs continuent de raconter l'histoire douloureuse de leur pays, privilégiant le thème de l'identité.
De la production sauvage à la censure de l'Etat (1976-1983), le cinéma argentin est aujourd'hui en effervescence bien que chaque film soit un pari pour son réalisateur. "On ne touche des subventions de l'Etat qu'après la sortie du film, on ne peut donc pas payer les acteurs et techniciens en temps voulu. Alors on essaie de travailler avec des amis, qui se relaient pour travailler sur le film et sur d'autres projets en parallèle." L'équipe se serre la ceinture, attend la paie et filme en mini DV pour diminuer les coûts. Mais le budget du kinescopage (transfert de vidéo sur support 35 mm) est encore plus important que celui de la réalisation elle-même. "Le coût global est difficile à estimer, à peu près 400 000 pesos (2) entre les dons, ce qui est payé en dollars et ce qui est payé en pesos, avant et après la dévaluation." Cinq films par an obtiennent une subvention. Seulement, lors de la chute du gouvernement De la Rua fin 2001, le peuple était dans la rue et personne à l'institut national de cinéma ne répondait à l'appel des bénéficiaires de la bourse pour distribuer l'argent. "Nous avons quand même réussi à terminer la copie à 23 heures la veille de la présentation du film au festival Mar del Prata, qui était prévue à 9 h 30 le lendemain", conclut Diego avec un sourire de défi.


(1) L'alliance de la beauté et de l'horreur tient lieu de trait caractéristique à chaque photographie du brésilien Sebastiaá Salgado, dans ses nombreux reportages sur l'exode des populations, migrants et dépossédés.
(2) L'année dernière, 400 000 pesos valaient 438 116 euros. Aujourd'hui ils ne valent plus que 110 650 euros.