JAMAIS TROP TARD / BLUTCH, PÉPLUM
Par Arno Guillou. On sort carrément de tout esprit vaguement humoristique pour cette histoire inspirée du Satiricon de Pétrone (et pas de Fellini, ce dernier s'étant lui aussi inspiré du texte original).
Blutch avait plutôt commencé dans le créneau de l'humour à Fluide glacial il y a quelques années, mais on le retrouve ici dans une veine beaucoup plus sombre, pour une bande dessinée marquée par des sentiments humains profonds.
Un jeune Romain découvre l'amour impossible et inaccessible en la personne d'une femme congelée dans un bloc de glace. Plus rien pour lui n'a alors d'importance que d'arriver à atteindre son bonheur. On se rappelle les cours de latin du mardi après-midi où l'on partait à rêver sur la voix lancinante du prof racontant telle ou telle épopée, tout en les imaginant se passer derrière la vitre de la fenêtre dans les champs voisins. Ici, c'est ce qu'on voyait par la fenêtre qui se déroule tout à coup, exactement comme on avait pu l'imaginer, les dialogues respectant une syntaxe latine, ce qui renforce cette ambiance.
Pas de couleurs, un dessin ne tombant jamais dans la facilité : Blutch est un virtuose qui a des choses à raconter, et le fond ne pâtit jamais de la qualité de la forme. A noter que Cornélius démontre ici encore sa véritable politique d'auteur (pas de produits), tout en proposant de supers objets-livres.
Une dernière précision : si vous n'avez pas fait de latin, rassurez-vous, ce livre vous concerne aussi : la recherche du bonheur est universelle.
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