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L'Oeil électrique #4 | Métier / Sujet d’études médicales

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Par Marc Babaud.

On ne dit pas " cobaye " alors ?
Non, non... Tout le monde fait d'ailleurs bien attention d'éviter ce terme. Il y a un minimum de délicatesse à ce niveau.

Comment en arrive-t-on à faire ça ?
Ça fonctionne beaucoup par bouche à oreille. Je connaissais quelqu'un qui l'avait fait. Ça circule pas mal dans le milieu étudiant en fait.

Il faut correspondre à certains critères ?
Il ne faut pas être gros fumeur, ne pas avoir pris de drogue décelable... La plupart du temps, c'est du cannabis qu'ils recherchent, et en l'occurrence, il faut ne pas en avoir consommé depuis au moins trois semaines pour que ça ne soit plus décelable. Il ne faut pas avoir bu dans les 48 heures précédentes. Bien sûr, il faut ne pas être particulièrement allergique et être relativement en bonne santé.

Et tout ça, c'est contrôlé à chaque fois ?
Oui. Tu as une prise de sang de début d'étude une semaine ou deux avant les tests, et tu as un test de fin d'étude. Mais tout ça n'est pas vraiment contraignant. Une fois les tests terminés, tu peux faire ce que tu veux : il n'y a pas de période pendant laquelle tu dois éviter de faire ceci ou cela.

D'autres restrictions ?
Il y a très peu de femmes en fait... Sauf lorsqu'il s'agit véritablement d'une étude ciblée sur les femmes. Je crois que c'est lié au fait qu'on ne peut jamais être sûr à 100% qu'une femme n'est pas enceinte, et qu'ils veulent éviter le moindre risque à ce niveau. Bien entendu, ça varie aussi en fonction du type d'étude : ils peuvent étudier un truc qui ne concerne que les asthmatiques, ou les personnes d'une certaine tranche d'âge. Par exemple un matin, on a croisé des petits vieux, parce qu'il s'agissait d'un test sur un médicament spécialement destiné aux personnes âgées.

En quoi consistent les tests exactement ? Tu prends un produit et on attend de voir ce qui se passe ?
Là aussi, c'est variable. S'il s'agit d'étudier un effet précis, ils vont orienter les tests. Récemment, j'ai testé un ralentisseur cardiaque ; alors ils te faisaient faire de l'exercice physique après avoir pris le produit, pour tester les réactions de ton cœur. Sur cette étude, tu te levais à six heures du matin, et juste après l'injection du produit, tu devais subir un test à l'effort : tu te retrouves sur un vélo d'appartement, avec un masque respiratoire sur la bouche, des électrodes partout, une aiguille plantée dans le bras... et ils te font pédaler jusqu'au maximum de tes capacités, avec le masque qui t'empêche de respirer... Là, c'était vraiment terrible.

Le genre de moment où tu te sens vraiment " cobaye " justement...
Complètement.

Il y a une durée moyenne pour les tests ?
C'est aussi très variable. Il y a des choses très peu contraignantes du style, tu prends un cacheton le matin et tu repasses en fin d'après-midi pour faire une prise de sang. Et à l'autre bout de l'échelle, certaines études peuvent durer trois semaines. C'est le genre d'étude qui tape un peu sur le système des " sujets " d'ailleurs : tu tournes en rond pendant des jours. Et si, par exemple, il y a des problèmes de réactions par rapport au soleil, il faut neutraliser ça, et donc il n'est pas question de sortir. Alors tu restes enfermé, avec une ambiance relativement conviviale, mais qui reste quand même très médicalisée, et donc un peu glauque.

Comment ça fonctionne au niveau du paiement ?
Là non plus, il n'y a pas de standard. Récemment, il y avait une étude où ils faisaient des prélèvements au niveau des testicules. Comme on pourrait s'en douter, il n'y avait pas beaucoup de monde à se presser pour le faire, et du coup, c'était très bien payé. C'est aussi un des critères qui te permet de voir le niveau de conséquences que ça peut avoir sur toi. Si c'est une étude payée deux ou trois mille francs, tu ne t'inquiètes pas trop, mais si c'est payé une brique, tu commences à te poser des questions. Bien sûr, c'est aussi échelonné en fonction du temps que tu passes. Ce qui est intéressant, c'est que c'est exempté d'impôts.

On peut arriver à gagner sa vie rien qu'en faisant ça ?
Difficilement, dans la mesure où il faut laisser s'écouler une période minimum entre deux études. Il y a des contrôles et ils recoupent les fichiers de toutes les sociétés d'études. Dans la boîte où je suis, c'est trois mois minimum d'intervalle entre deux études. Et dans le contrat, tu t'engages à ne pas avoir participé à des études dans une autre boîte pendant cette période. Je pense aussi que du côté du Ministère de la Santé, il y a une volonté d'éviter que des gens en arrivent justement à vivre de ça. Aussi, tu ne peux pas percevoir plus de 25 000 francs par an dans le cadre de recherches médicales.

Tu es informé sur le degré de nocivité éventuelle d'un produit pour ton organisme ?
C'est assez paradoxal, parce que j'imagine que tout le monde doit flipper sur la toxicité des produits, mais en même temps, j'ai très rarement vu quelqu'un qui se renseignait sur la nature d'un test. Moi-même, la plupart du temps, je ne demande pas d'informations très précises. Là, récemment j'ai demandé parce que c'est ma mère qui s'inquiétait.

Et les médecins sont ouverts à ce genre de questions ?
Oui, ils répondent. Mais d'un autre côté, si un médecin commence à t'expliquer que c'est un neuro-bloquant, qui va empêcher telles cellules de contaminer les autres si elles sont malades... Ça t'avance pas beaucoup non plus. En même temps, ils n'ont pas véritablement la réponse absolue sur les conséquences éventuelles. Bon, normalement, il y a une bonne sécurité : les médicaments sont testés à des doses cent fois supérieures sur l'animal , avant d'être testés sur l'homme. Et puis, souvent, il s'agit uniquement de tester un médicament existant déjà sous une autre forme. Par exemple, un médicament existe en poudre, et ils veulent le tester sous forme de pilule. La loi oblige à refaire des études. Et dans ce genre de cas, si tu testes du Doliprane en crème, a priori, c'est pas très risqué.

Si un médecin te balance une terminologie incompréhensible, c'est peut-être aussi pour couper court à tes éventuelles questions...
Peut-être. C'est certain que ça ne favorise pas le dialogue. D'un autre côté, d'une manière générale, je pense qu'il y a aussi une certaine désinvolture de la part des " sujets ", qui fait qu'ils ne cherchent pas vraiment à savoir.

Est-ce que tu as déjà eu des désagréments à la suite d'une étude ?
Pas vraiment. Et parmi les autres personnes qui font ça assez régulièrement, à ma connaissance, il n'y en a pas eu non plus.

Tu retrouves un peu toujours les mêmes personnes ?
Il y a des habitués, des gens qui reviennent tous les six mois ou tous les ans. Ça permet de se payer des vacances par exemple. À la limite, c'est même pas mal pour se refaire une santé. T'es payé 2500 balles pour passer trois ou quatre jours tranquille, sans rien avoir à faire. Tu peux lire, ou regarder des films toute la journée, faire une bonne cure de sommeil, des fois, ce genre de considérations entre carrément en jeu.

Il y a aussi un côté social ?
Un peu, oui. C'est marrant, parce que je n'ai pas fait l'armée, mais j'imagine que ça doit un peu ressembler à ça : tu vois des gens d'horizons un peu divers, il y a une ambiance un peu chambrée, le côté hommes en groupe.

Qu'est-ce qui se passerait si un problème survenait à la suite d'une étude ?
Je ne me suis jamais trop posé la question, mais je pense que c'est pour ta gueule. Parce qu'on te fait signer des papiers où les risques éventuels sont spécifiés.