Warning: mysql_num_rows(): supplied argument is not a valid MySQL result resource in /mnt/153/sda/7/9/oeil.electrique/magazine/php/en-tetes.php on line 170
L'Oeil électrique #7 | Société / OGM: privatisation du vivant

> C’EST BEAU LA VIE
+ Bien dans sa peau

> SOCIÉTÉ
+ OGM: privatisation du vivant
+ Révolutions quotidiennes
+ Daniel Mermet

> BANDE DESSINÉE
+ Le journal de Judith et Marinette

> LITTÉRATURE
+ Jean-Bernard Pouy

> VOYAGE
+ A l’ouest de Denver
+ Colombie

> PHOTO
+ Max Pam

> 4 LIVRES : USA
+ Denis Johnson : Jesus’s Son
+ Brady Udall : Lâchons les chiens
+ Thomas Mc Guane : L’homme qui avait perdu son nom
+ Richard Ford : Rock Springs

> BOUQUINERIE
+ Frédéric Poincelet : Une relecture
+ Daniel Clowes : Ghost World
+ Alternatives économiques : Les placements éthiques
+ Paul Cox : L’histoire de l'art
+ Robert Crumb : Mister Nostalgia
+ Franck O’Connor : Le visage du mal

> NOUVEAUX SONS
+ Tom Waits : Mule Variations
+ Mogwai : Come on Die young
+ Babacar Faye : Sing Sing
+ Muslimgauze : Remixs vol 3
+ Andre Williams : Silky
+ Legendary Pink Dots : Nemesis Online
+ Add N to X : Avant Hard
+ Make Up : I Want Some

> JAMAIS TROP TARD
+ Pour the blues

> REVUES
+ Ferraille
+ Quasimodo

> ACTION
+ Le réseau Voltaire

Par Arno Guillou, Katell Chantreau.

Les OGM (Organismes Génétiquement Modifiés, aussi connus sous le nom de Transgènes) : s'il y a quelque chose de pas très clair en ce moment, c'est bien ça. Et pendant que chacun essaie de se faire une opinion, des énormes sociétés envahissent le marché avec des produits dont on ne sait quasiment rien. Rien au niveau sanitaire d'abord (risques pour la santé et pour l'environnement), et rien au niveau des objectifs que servent ces produits. Jean-Pierre Berlan, directeur de recherche à l'Institut National de Recherche Agronomique de Montpellier, recentre le débat sur ces firmes qui petit à petit, s'accaparent la reproduction du vivant.

Le Monopole

Le débat sur les OGM est actuellement focalisé sur le risque sanitaire. Ce débat en occulte un autre, beaucoup plus important…
Il me semble que le débat sur le risque sanitaire est un vrai débat : il ne faut pas l'éliminer. Mais je pense que ce débat peut être manipulé, puisque d'un côté, il y a les experts des firmes et de l'autre côté, il y a les experts qui pensent qu'il y a effectivement des risques sanitaires. Ça va aboutir à une querelle d'experts qui finira par lasser l'opinion publique. Et finalement, c'est l'objectif qui est recherché.

C'est-à-dire ?
En centrant l'affaire sur ce débat-là, les firmes espèrent bien qu'elles vont pouvoir éviter l'autre débat, et l'autre débat est celui en effet qui me semble très sérieux à long terme : la confiscation du vivant.

Quelles sont les firmes qui détiennent ce monopole ?
Les firmes qui s'occupent de ce qu'on appelle maintenant du nom bien pompeux et passablement contradictoire de " sciences de la vie " sont issues du secteur chimique, mais également pharmaceutique, les deux étant assez liés. Depuis une quinzaine d'années, elles cherchent à intégrer leur chimie dans le vivant. Leur objectif est d'arriver à vendre le vivant en kit : l'agriculteur achète les semences, l'herbicide et le pesticide. Il s'agit de faire de l'agriculteur quelqu'un qui est complètement pieds et poings liés face à ce vivant contrôlé par les firmes.

Combien sont-elles ?
Il y en a environ une demi-douzaine qui ont une importance dans le monde. Un premier groupe s'est constitué autour de Dupont, le grand chimiste américain et Pionneer, une entreprise américaine de semence de maïs " hybride ". Un deuxième groupe est formé autour de Monsanto, qui est la boîte la plus agressive. Il y a aussi Agrevo en Allemagne, Zénéca en Angleterre, en France un groupe va sans doute se constituer autour de Rhône-Poulenc. Il faut savoir que Monsanto, par exemple, a créé l'Agent Orange, très utilisé au Vietnam. Monsanto a beaucoup participé à la guerre du Vietnam en fournissant des défoliants extrêmement contaminés par la dioxine, si j'en crois ce qui a été écrit dans The Ecologist. La conséquence est qu'il y a des centaines de milliers d'enfants qui sont nés avec des malformations très sévères à la suite de cette campagne au défoliant…

Quelle est la démarche de ces firmes ?
Leur domaine, c'est la génétique agricole, elles vont donc vendre des semences. Pour cela, il faut que l'agriculteur ne puisse pas mettre de côté une partie de sa récolte, comme il l'a toujours fait : l'agriculture a commencé le jour où après avoir collecté des graines, l'Homme a décidé d'en garder une partie pour ressemer l'année suivante. Donc là, il y a une contradiction qui est tout à fait centrale, c'est qu'un semencier ne peut pas vendre de semences tant que l'agriculteur peut faire les siennes.

Comment les semenciers contournent-ils cette " difficulté " ?
En même temps qu'un semencier doit faire des variétés stériles pour pouvoir gagner de l'argent, la dernière chose qu'il doit faire, c'est d'affirmer son objectif. Comment pouvez-vous vous présenter devant les paysans en disant : " Bon, écoutez les gars, moi, mon objectif, c'est de vous empêcher de reproduire les plantes et les animaux ". Ça paraîtrait tellement énorme ! L'objectif de la génétique agricole d'une manière générale, c'est bien entendu d'atteindre ses objectifs par quelque moyen que ce soit, d'une part, mais d'autre part, ça a toujours aussi été d'occulter ces moyens en mettant en avant les avantages à court terme pour les agriculteurs. Ce n'est que maintenant, avec la technique dite Terminator, que les semenciers avouent leurs objectifs : faire des variétés stériles. Et ça, ça traduit le changement de rapport de force entre ce qui était autrefois des petites sociétés productrices de semences, qui étaient face à une paysannerie nombreuse et organisée, et un vivant qui était quelque chose de sacré.

Tout ça a disparu ?
Le vivant n'est plus du tout sacré, c'est juste de l'ADN, il n'y a pas de quoi s'exciter dessus. Ensuite, les paysans ont été éliminés, il en existe actuellement très peu en France. Il faudrait les protéger très rapidement si on veut en garder quelques-uns. En face, les semenciers traditionnels, ces petites maisons de sélection qui, en particulier en France, ont fait un travail remarquable pendant très longtemps, ont fait place à ces espèces de mastodontes qui ont un pouvoir absolument énorme.

Les techniques qui empêchent la reproduction

Qu'est-ce que le Terminator ?< /P> La technique baptisée Terminator met bien en évidence le caractère mortifère de ces techniques, et est révélatrice de ce que veulent ces grandes firmes. Il faut bien distinguer les OGM " virtuels ", qui peuvent avoir toutes les vertus : peut-être qu'un jour on fera des bananes transgéniques qui permettront de vacciner gratuitement les pays du tiers monde… Je n'y crois guère… La réalité de tout ça, c'est Terminator, qui permet d'insérer un transgène tueur, activé avant le semis dans un bain de tétracycline (ou un herbicide ou n'importe quel autre antibiotique) et qui va tuer son propre germe. L'agriculteur a des plantes qui sont là aussi biologiquement stériles, et il ne pourra pas les ressemer. Le brevet a été déposé mais la technique n'est pas encore au point. Il faut attendre encore quelques années. Mais cela prouve que les firmes dites des sciences de la vie s'intéressent surtout au non-vivant, à faire des plantes stériles.

La démarche de ces firmes se rapproche de celle de Microsoft et de ses logiciels.
Si, comme on nous le ressasse depuis des décennies, le plus grand triomphe de la biologie moderne, c'est d'avoir fait du vivant une information, c'est-à-dire un programme, un logiciel génétique, il faut bien voir que ça a une double conséquence : premièrement, un sélectionneur, qu'est-ce que c'est ? Ces firmes qui fabriquent ces semences fabriquent en fait des logiciels génétiques ayant certaines caractéristiques, et deuxièmement, l'agriculteur, qu'est-ce qu'il fait dans son champ ? Il reproduit et multiplie ces logiciels génétiques. Donc, la firme doit interdire à l'agriculteur de reproduire son logiciel génétique si elle veut gagner de l'argent ; il faut qu'elle puisse protéger son " logiciel ". Il y a un antagonisme profond entre le fait que le vivant se reproduise et se multiplie (c'est sa propriété fondamentale) et le fait que, pour que des entreprises puissent gagner de l'argent dans ce domaine-là, il faut empêcher que le vivant se reproduise dans le champ du paysan.

Ressemer son propre grain, une " copie " donc, peut être illégal ?
Encore plus extrême que les OGM, aux Etats-Unis, il y a en cours un " Terminator légal ", qui interdit légalement à l'agriculteur de ressemer le grain qu'il a récolté. C'est une menace tout à fait sérieuse. Il y a un projet de directive européenne qui aboutira à ça aussi, c'est-à-dire un principe de copyright sur le vivant, sans même avoir à le rendre stérile.

Existe-t-il encore des agriculteurs qui produisent leurs semences non stériles et qui les réutilisent ?
Oui, bien sûr. En Europe, le blé, l'orge, l'avoine, par exemple, sont des plantes qui se reproduisent identiquement à elles-mêmes d'une génération à l'autre, plante à plante, donc dans ces cas-là, les agriculteurs peuvent continuer à ressemer leurs grains récoltés, et d'ailleurs ne s'en privent pas.

Il n'y a pas une dégénérescence, au bout d'un certain temps ?

Cette idée de dégénérescence traîne dans la littérature depuis très longtemps, depuis le XIXe siècle, quand les premiers sélectionneurs professionnels se sont aperçus qu'ils devaient faire des semences que l'agriculteur ne pouvait pas reproduire. Ils ont prétendu que les variétés à plus haut rendement qu'ils sélectionnaient se détérioraient dans le champs de l'agriculteur, pour pousser ce dernier à en racheter. Il peut y avoir un élément de vérité là-dedans, à savoir que si vous cultivez le même génotype, c'est-à-dire le même type de plante, au bout d'un moment il peut y avoir des champignons qui vont muter, ou des virus, et l'attaquer, ou d'autres types de prédateurs, donc votre plante finira par se détériorer dans le champ, mais il faut bien voir que c'est lié à d'autres éléments que le facteur héréditaire de la plante elle-même.

Et le maïs ? Un agriculteur peut-il aussi replanter ses propres semences ?< /P> Non, pas les " hybrides " (des plantes sélectionnées par croisements mais qui n'ont pas subi de manipulation génétique, ndlr). Ces plantes se détériorent dans le champ du paysan, et là, c'est lié à leur structure génétique. Le paysan ne peut pas les ressemer.

Et c'est naturel ?
Non, là, c'est une sélection qui a été faite pour que ce soit comme ça.

Comment les firmes ont-elles réussi à vendre ce grain aux agriculteurs ?
Les sélectionneurs ont fait tout un travail de sélection, qui a permis de reproduire autant de fois que l'on voulait ces plantes à l'identique, qui a permis d'obtenir un modèle. Ils ont extrait le meilleur modèle de plante, meilleur que la moyenne des plantes dont celles-ci sont issues.

Donc il y a aussi eu une sélection pour rendre la plante supérieure.
On a dit aux agriculteurs américains, voici notre nouveau maïs " hybride " révolutionnaire : il est supérieur au maïs à fécondation ouverte. Les agriculteurs ont voulu voir. Alors ils les ont semés côte à

côte, et la variété " hybride " se révélait meilleure en général que la variété de ferme non sélectionnée. En même temps, ils avaient très bien compris qu'il y avait une arnaque derrière, puisqu'ils l'ont surnommé le maïs mule. La mule est stérile ! Ce qui est étonnant dans cette affaire-là, c'est que le simple paysan a très bien compris, depuis maintenant 80 ans, ce qui se passe, alors qu'on lui fait croire que c'est la nature qui le veut stérile.

Communication

Pour revenir aux OGM, Monsanto a fait des publicités expliquant que les OGM pouvaient résoudre le problème de faim dans le monde, en créant des plantes qui résisteraient sans doute aux milieux salins, aux milieux très peu hydratés…
... et pousseraient bientôt sur le bitume des autoroutes ! Il y a, dans notre société, l'idée que d'un coup de baguette magique, on va résoudre tous les problèmes. Pendant très longtemps, on a dit que les antibiotiques, c'était la solution pour tout. Maintenant, on s'aperçoit bien entendu que les microbes s'adaptent aux antibiotiques, ils deviennent résistants. Il y a toujours cette illusion technicienne qu'on peut tout résoudre à l'aide de suffisamment d'efforts scientifiques et techniques. Ça c'est le premier élément. Le deuxième élément, c'est qu'on assiste dans ce domaine, à une campagne systématique de désinformation : les firmes de la bio-industrie cherchent à se donner des allures à la fois philanthropiques et écologiques.

Ce qui pourrait sembler être le cas, non ?
En fait, elles veulent absolument éviter toute réglementation de l'état qui viendrait interférer avec leur volonté de conquérir de nouveaux marchés. Donc elles ont mis au point cette stratégie de communication. En effet, un député qui voudrait maintenant réglementer cette nouvelle industrie, ses collègues lui diraient : "Mais enfin, pourquoi voulez-vous réglementer ces gens qui le font très bien tout seuls ? La meilleure preuve, c'est que ce sont des entreprises à la fois philanthropiques et écologiques, elles ne jurent que par l'agriculture durable, la diminution des pollutions, etc. ". Là, il y a toute une stratégie de communication qui vise à faire taire les critiques. Sur le fond, ce sont de vastes bobards. D'une part, accroître la production agricole dans les pays industriels : le problème ici n'est pas la sous-production mais la surproduction. On ne sait pas quoi faire des excédents. Quant à la question des pays du tiers monde, ces firmes ne sont pas là pour résoudre la faim dans le monde, elles sont là pour faire de l'argent, et ce n'est pas en utilisant des techniques de stérilisation du vivant comme elles le font systématiquement qu'on va permettre aux paysans du tiers monde de résoudre leur problème. C'est un raisonnement complètement absurde.

Ils n'auront en plus jamais les moyens de se payer ça !
Bien sûr ! Il n'y a pas de marché. Les OGM mis aux point à l'heure actuelle sont destinés aux pays développés et qui plus est, ce sont des plantes à pesticides ou herbicides, qui fabriquent leurs propres pesticides ou sont tolérantes aux herbicides… qui sont fabriquées par ces mêmes firmes !

C'est le cas de Monsanto, qui produit aussi le désherbant Roundup.
Oui, mais ce ne sont pas les seuls. Le gène introduit dans la plante devient une éponge à herbicides.

Ce qui ne doit pas être spécialement bon pour la santé...
Ah ben, j'imagine que non. A partir du moment où ils sont efficaces, ils ont des effets secondaires. Ou s'ils ne sont pas efficaces, ils ne servent à rien. Mais bon, comme ils sont efficaces… Le Roundup a été mis en cause par l'Université de Californie : c'est la troisième cause de décès parmi les ouvriers agricoles en Californie… Ce ne sont pas du tout des produits anodins. Un certain nombre d'entre eux ont été interdits.

Est-il possible d'éliminer ces produits chimiques de l'agriculture ? De retourner à une agriculture sans pesticides, sans OGM, une agriculture durable en fait ?
Il faudrait voir cas par cas. Ce que je sais, c'est qu'il y a des agriculteurs qui sont retournés vers des formes d'agriculture moins intensives : ils se sont aperçus qu'ils avaient moins de travail et gagnaient plus d'argent. De toute façon, notre agriculture intensive ne tient que parce qu'elle est très fortement subventionnée.

Recherche et politique

Y a-t-il une réelle utilité des OGM ?
Ce sont des outils très puissants. Tellement puissants que les confier à des firmes privées, ça revient à confier des bombes atomiques à des intérêts privés. Ces outils devraient être sévèrement contrôlés, parce qu'il y a trop de dérives dans ce domaine, trop de scientifiques font n'importe quoi, y compris dans le domaine de la recherche dite " publique ". Curieusement, tous ces travaux seraient extrêmement utiles pour mieux comprendre les mécanismes de la pollution chimique, ce qui est assez paradoxal évidemment, et permettrait d'aller vers des formes d'agriculture dans lesquelles ces formes de pollutions chimiques seraient étroitement contrôlées.

Mais actuellement, les scientifiques se rendent-ils compte de ce qu'ils font ?
Depuis une quinzaine d'années, la recherche publique est, sous prétexte de compétitivité, sous la coupe d'intérêts privés. Dans une société capitaliste comme la nôtre, le sort de toute chose est de devenir une source de profit. En médecine par exemple, la formation continue des médecins est largement assurée par les laboratoires, mais dans les facultés de médecine aussi, dans la mesure où les professeurs de médecine travaillent sous contrat avec des firmes. Donc pendant qu'on fait des travaux pour les firmes, qu'on le veuille ou pas, on ne fait pas de travaux nécessaires dans d'autres domaines. L'agriculture et la médecine ont les mêmes problèmes. Il faudra, un jour, s'attaquer au problème au niveau politique et chasser les marchands du temple. Il faudra définir les règles de collaboration de façon très claire entre les organismes de recherche et les chercheurs.

La recherche en faveur des pays du tiers monde s'en trouve modifiée ?
Elle est moins active qu'elle a pu l'être à une certaine époque. En plus, par exemple, en 1997, le Centre international d'amélioration du blé et du maïs, un grand organisme de recherche qui se trouve à Mexico, et qui fait des travaux pour les pays du tiers monde, a réalisé un symposium international sur les " hybrides ", et les sponsors de cette grande messe étaient Monsanto, Novartis etc. Là aussi, la recherche publique dans les pays du tiers monde, en grande partie pilotée par les firmes privées.

Quelle est la position de la France sur les OGM ?
A propos du maïs Bt, contenant son propre pesticide, et un gène de résistance à l'ampicilline, un antibiotique largement utilisé, il y a eu une commission citoyenne qui s'est réunie au mois de juin dernier, et l'une de ses conclusions a été qu'il ne fallait pas donner l'autorisation de commercialiser ce maïs Bt du fait de la présence de gènes de résistance à l'ampicilline. L'immense majorité des spécialistes des antibiotiques pensent aussi qu'il est absurde de diffuser des gènes de résistance aux antibiotiques. Il y a suffisamment de résistance aux antibiotiques comme ça, ce n'est pas la peine d'en rajouter ! Or, quinze jours après la commission citoyenne, Lionel Jospin, apparemment sous la pression des Américains, de Al Gore, le vice-président des Etats-Unis, lui-même actionné par Monsanto, a donné l'autorisation de commercialiser le maïs Bt.

Comment cela a pu se passer ?
Un coup de téléphone. Je cite ma source, The Ecologist : Al Gore aurait dit que l'attitude de la France dans ce domaine n'était pas raisonnable, que scientifiquement rien n'est prouvé, que le Maïs Bt est excellent pour l'environnement, la preuve : les Etats-Unis ont autorisé son commerce.

Il y a quand même Dominique Voynet, un ministre de l'environnement écologiste au gouvernement…
Oui, et ce qui est surprenant, c'est qu'elle n'ait pas immédiatement démissionné quand cette décision a été prise. madame Corinne Lepage qui a précédé madame Voynet au même poste, a obtenu de Juppé l'interdiction de la commercialisation du maïs Bt, ce qui n'a pas dû être facile. C'est quand même un gouvernement de gauche, avec la présence d'une écologiste distinguée, qui a laissé commercialiser ce produit.

Et au niveau Européen ?
Ils se sont mis en tête que s'il y avait un domaine où ils pouvaient avoir une activité intéressante, c'était celui des sciences et des technologies, pour promouvoir une course avec les Etats-Unis. Ces gens-là ont été victimes de l'illusion technologique, à savoir que nous aurions un retard sur les Américains. Ce retard, je considère que c'est une avance. Ça prouve que nous avons encore des biologistes et non pas des nécro-technologistes. Mais le problème n'est pas là. si on regarde les problèmes que nous avons en France ou aux Etats-Unis : obésité, cancer du colon… liés à l'industrialisation de la nourriture, à la pollution liée à l'agriculture, on ne fera croire à personne que c'est en faisant des OGM qu'on résoudra ces problèmes. Ce qu'il faut, c'est revenir à des formes de consommation alimentaire moins industrielles et à une agriculture plus respectueuse de l'environnement, plus durable. Les OGM ne vont pas vers ça.