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L'Oeil électrique #9 | Musique / Mahmoud Ahmed

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Par Katell Chantreau.
Photos : Lionel Boscher.

Erè mèla mèla, sorti en France en 1986, est le seul 33 tours de Mahmoud Ahmed que vous aurez peut-être la chance de découvrir dans les bacs d'un disquaire. Avec ravissement, on découvre pour la première fois en France, les accents de la musique éthiopienne moderne. Un bijou ! ça commence par un swing jazzy, les épaules commencent à se balancer de manière lancinante, les cuivres s'offrent quelques variations et la voix chaude de Mahmoud se pose doucement sur cette mélodie. Irrésistible... la tête entre dans la danse et tout le corps s'y met. Rencontre chaleureuse avec un homme simple et un chanteur qui sait en Ethiopie, et même en France, déclencher la frénétique eskista, danse des épaules et du torse qui vaut aux Gouragués, l'ethnie d'origine de Mahmoud, sa réputation festive.

Comment avez-vous commencé la musique ?
J'ai commencé à chanter à l'école avec mes copains. Après, je suis devenu cireur de chaussures et j'ai continué à chanter, jusqu'à ce que j'arrive à l'Arizona Club. Dans cette boîte d'Addis Abeba jouaient des musiciens et des chanteurs de l'Imperial Bodyguard Orchestra, l'orchestre de la garde impériale. Là, je me suis fait remarquer et j'ai commencé à chanter avec eux. Ça a duré onze ans, de 1955 à 1966 (selon le calendrier éthiopien, c'est-à-dire de 1973 à 1974 pour nous).

Quelles influences y a-t-il dans votre musique ?
La musique et le chant traditionnels éthiopiens. En Ethiopie, il y a 72 langues, il y a beaucoup de cultures très différentes : amharique, gouragué, tigré... et un tas de traditions musicales. Moi, je travaille surtout dans la continuité des traditions amharique et gouragué. C'est d'ailleurs dans ces langues que je chante : le gouraguigna, la langue des Gouragués, ma langue maternelle, et l'amharique qui est la langue nationale de toute l'Ethiopie, la langue de communication entre toutes les ethnies du pays.

Comment écrivez-vous vos chansons ?
A tout moment, à tout endroit, ça peut arriver : quand je suis assis à une table, quand je me retrouve sur une plage loin de la ville, quand je joue du piano, quand je dors, quand je rêve... les poèmes viennent et la mélodie avec. Et alors j'écris. ça parle d'amour, de paix, d'amour du pays, du mal du pays, quand on est loin de ceux qu'on aime...

En 1948, un décret impérial a confié le monopole de la production et de l'importation des disques à l'Agher Feqer

Maheb (Théâtre national et nationaliste). La musique éthiopienne dans son ensemble est-elle très liée à la politique et à l'Etat ?
C'est terminé maintenant. C'est vrai qu'autrefois il y avait un contrôle de l'Etat. Aujourd'hui, il n'y a plus de problèmes : si on veut parler de politique, on en parle, si on veut pas en parler, on n'en parle pas. Et on chante ce qu'on veut où on veut, plus uniquement dans l'Agher Feqer qui reste un des premiers théâtres nationaux.

Entre 1969 et 1975, plus de 500 45 tours ont été produits en Ethiopie. On a appelé ça "l'âge d'or du Swinging Addis". Comment avez-vous vécu cette période ?
C'était bien pour moi parce que j'étais jeune, j'avais la pêche et on jouait de la musique. Je chantais avec l'orchestre de la garde nationale. On jouait dans des hôtels, des clubs, des bars dans différents quartiers d'Addis, même si c'était pas très toléré qu'on fasse des extras comme ça. En fait, c'était pas permis, on le faisait sans le dire au chef de la garde impériale. On faisait le mur pour aller jouer dans des endroits privés. C'était possible de jouer et de mener sa vie en dehors de l'institution. Mais dans ce temps-là, il n'y avait pas vraiment de professionnels de la production qui prenaient en charge la carrière des artistes pour qu'ils se développent, qu'ils fassent des progrès. Et à un moment donné, les disques se sont arrêtés, et sont arrivées les cassettes, et là, c'est une autre histoire. A la chute de l'empereur en 1974, évidemment, l'orchestre de la garde nationale a été dissout et il a fallu qu'on se débrouille pour jouer dans des hôtels ici et là. L'âge d'or s'est arrêté à ce moment-là.

Aujourd'hui en Ethiopie, qu'est-ce qu'on écoute comme musique ?
Toutes sortes, toutes les dernières musiques, de partout ! Du disco pour les night-clubs... J'ai acheté ici deux/trois cassettes de musique antillaise pour mon magasin à Addis. Peut-être qu'un jour, je m'en inspirerai pour ma musique.

Qu'est-ce que la scène représente pour vous ?
Je suis fou quand je monte sur scène... je plane littéralement. Rendre les gens heureux, j'adore ça, les faire venir à moi et les rendre heureux ! Et puis nous faisons beaucoup de concerts dans le monde entier : en Angleterre, au Canada, en Israël, en Australie, au Japon, en Italie... Souvent, les concerts sont à l'invitation des communautés éthiopiennes de la diaspora. Ce qui est nouveau cette année, c'est que le public s'élargit et c'est très bien comme ça, que les gens soient mélangés.